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Ma mère, mes tantes, l'Algérie et moi
EAN13
9782812711633
ISBN
978-2-8127-1163-3
Éditeur
Presses du Midi
Date de publication
Nombre de pages
132
Dimensions
21 x 14 x 1,5 cm
Poids
183 g
Langue
français
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Ma mère, mes tantes, l'Algérie et moi

De

Presses du Midi

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C'est alors que le mauvais génie décida que le mauvais sang accompagnerait chaque journée. Ma mère parlait toujours sous la protection de la sacro-sainte main de Fatma afin de prémunir les siens de malchance ou de fatalité. Il faut croire que cela ne suffisait pas. En ouvrant son magasin de la rue Bab Azoun, mon père nous faussa compagnie pour s'en aller errer au firmament des paradis célestes. Une crise cardiaque l'emporta avant qu'il ait pu dire adieu à son épouse, à son fils et à ses belles soeurs. Ce fut un torrent de larmes que déversèrent les femmes de la famille auxquelles se joignirent tantes éloignées, cousines, nièces et voisines du quartier. Bien entendu, je comprenais les pleurs de ma mère mais trouvais indécent que mes tantes participent à ce concert larmoyant tant elles critiquaient mon père de son vivant. Je suivis le corbillard jusqu'au cimetière de Saint-Eugène entouré de mes oncles très dignes dans leurs costumes foncés. Je bénissais, si l'on peut bénir ce jour-là, de ne pas subir les pleurnicheries de mes tantes car on m'apprit que, dans ma communauté, les femmes n'assistaient pas aux obsèques de leurs proches. Heureusement, mes sept ans avaient sonné à l'horloge de mon enfance. Je compris alors qu'au-delà de ma peine, je devenais l'homme de la maison. Il me fallut faire abstraction de mon chagrin pour, pensai-je, seconder ma mère qui me surprit en se révélant une maîtresse-femme. À la maison devenue vide, elle ne laissa apparaître nulle impatience, nulle colère, nulle souffrance devant moi mais bien souvent, dans la solitude de ses nuits blanches, je l'entendis pleurer. Le chagrin muet, elle organisa notre vie en sauvegardant le commerce de son mari qui devenait notre unique gagne-pain. J'étais en admiration devant cette femme qui n'avait jamais travaillé hors de chez elle et qui reprenait le flambeau. Si ce n'était son tailleur noir et l'absence de tout maquillage, rien ne supposait son veuvage. Après dix jours de fermeture, ma mère avait rouvert le magasin de la rue Bab Azoun.
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