Et la pierre s'effrita

« ... Il y a cinq ans, je faisais une séance de dédicaces dans une librairie pour mon dernier roman C'était toujours l'été. J'ai levé les yeux sur le lecteur suivant. Ils ont buté sur une carrure intimidante et un sourire timide. Comme il ne bougeait pas, serrant le livre contre lui, j'ai tendu la main et lui ai demandé son prénom. J'ai écrit : « À Louis, qui doit être un homme en or. Élise ». Il restait là, à contempler la dédicace avec sérieux. Il avait ses cheveux châtains en pétard, sans artifice. Du grand n'importe quoi en opposition avec sa barbe et sa moustache soignées. Du grand n'importe quoi en opposition avec sa barbe et sa moustache soignées. Il portait un noeud pap bleu nuit sur sa chemisette blanche. Mais qui se hasarde à mettre un noeud pap sur une chemisette, qui plus est le col ouvert ? Si ces bizarreries et ces contrastes reflétaient sa personnalité, ça donnait envie de la connaître. Je lui ai demandé s'il avait déjà lu le roman ou s'il était venu pour l'acheter. Sa réponse, franche et candide a été que non, ni l'un ni l'autre, il était venu acheter des BD. Mais il n'avait jamais rencontré d'auteur, alors, répondant à l'invitation du hasard, il avait voulu expérimenter. »